Présidence
de
M. Pierre Méhaignerie.
Examen du projet de loi portant réforme des
retraites (n° 2760) (M. Denis Jacquat, rapporteur).
M. Dominique
Tian : Contrairement à nombre de nos
collègues, je considère que le projet fait montre d'une extrême modération, en
particulier lorsque l'on s'avise de la politique de nos voisins européens – en
particulier allemands et espagnols. J'ajoute que ce texte répare l'erreur
socialiste historique que fut l'abaissement de l'âge de la retraite à 60 ans,
lequel a mis en danger l'ensemble de notre système.
Par ailleurs, je salue la volonté du
Gouvernement d'oeuvrer en faveur d'un peu plus d'équité entre les secteurs
public et privé, même s'il fait preuve d'une extrême prudence en la matière. M.
le ministre Éric Woerth, au mois de mars, déclarait ainsi dans Le Monde que le
calcul de la retraite des fonctionnaires à partir des six derniers mois
constitue « un sujet qui fâche dont [il ne sait pas] s'il faut vraiment le
mettre sur la table. » Et il ajoutait : « Doit-on tenir compte de la spécificité
du secteur public ? ». Précisément, quelle est-elle ? Chacun sait que les six
derniers mois de carrière, dans les administrations, sont l'occasion de réaliser
la fameuse opération « coup de chapeau », soit des promotions fictives
interdites aux travailleurs du secteur privé. Au mois d'avril 2003,
la Cour des
Comptes indiquait à ce propos que 31 % des fonctionnaires du ministère de
l'Intérieur, 30 % de ceux du ministère de la défense et 23 % de ceux de Bercy en
bénéficient. Faut-il continuer dans cette voie ? Je ne le crois
pas.
J'ajoute que le départ à la retraite
à l'âge de 62 ans ne s'appliquera pas au million de fonctionnaires classés en
catégorie active et ayant donc des emplois présentant un risque particulier ou
des fatigues exceptionnelles. N'est-il pas temps de mettre un peu d'ordre dans
cette classification datant de 1853 ? Les douaniers, les agents d'entretien, les
aiguilleurs du ciel prennent-ils des risques particuliers et sont-ils
exceptionnellement fatigués ? Les salariés qui travaillent dans le secteur privé
et qui, eux, ont des métiers pénibles dans le bâtiment ou les transports,
l'artisanat ou l'agriculture, en doutent fortement alors qu'ils voudraient bien
partir à la retraite à l'âge de 50 ans.
Enfin, je m'étonne que des
amendements qui tendaient à accroître la justice sociale aient été déclarés
irrecevables au titre de l'article 40 par la Commission des finances et son
président, Jérôme Cahuzac. Si faire travailler un peu plus longtemps un
aiguilleur du ciel coûte en effet plus d'argent à l'État, n'est-ce pas aussi un
bon moyen d'améliorer nos finances publiques ? Quoi qu'il en soit, je fais
confiance au Gouvernement pour réintroduire certains d'entre eux, ce dont je le
remercie par avance.