Accès à l’Aide médicale d’État
Des restrictions contestées
Les associations le redoutaient, les députés l’ont fait. Dans le cadre de l’examen des crédits santé dans le projet de loi de finances 2011, ils ont restreint l’accès à l’Aide médicale d’État (AME), instaurant notamment un droit d’entrée de 30 euros.
EN 2009, 215 000 étrangers en situation irrégulière ayant des ressources inférieures à 634 euros ont bénéficié de l’AME. Le coût du dispositif a fortement augmenté, notamment avec la prise en charge, depuis 2007, des ressortissants roumains et bulgares, auparavant pris en charge par l’assurance-maladie. D’où la nécessité, selon le gouvernement et la majorité, d’encadrer le dispositif, pour lequel un budget de 588 millions (soit près de la moitié du budget santé total, de 1,22 milliard) est prévu pour 2011. Et une mission d’expertise a été confiée à l’inspection générale des Affaires sociales et à celle des Finances, qui, selon Roselyne Bachelot, rendra ses conclusions à la fin du mois. La ministre a tenu à souligner qu’il n’y avait « pas de dérive financière » de l’AME, celle-ci évoluant « de la même façon que les dépenses de santé » et que, contrairement à l’affirmation de certains parlementaires de la majorité, « les fraudes ne sont pas majoritaires ».
Certains soins exclus.
Un amendement de Dominique Tian (UMP), qui souhaitait notamment réduire l’aide aux seuls soins urgents et la limiter à trois mois au lieu d’un an a été rejeté, comme le souhaitait la ministre. En revanche, et comme elle l’avait suggéré dès juin, le principe d’un droit d’entrée dans le système, de 30 euros, a été adopté grâce à l’amendement présenté par plusieurs députés de la majorité. Les parlementaires ont aussi adopté un autre amendement de M. Tian, restreignant le panier de soins des bénéficiaires de l’AME aux seuls actes dont le service médical rendu est important ou modéré ; ce qui exclut par exemple le traitement de la stérilité, la chirurgie esthétique et les cures thermales. « Ce n’est pas, a indiqué la ministre, que certains bénéficiaires fassent appel à des soins de chirurgie esthétique ou demandent une cure thermale, mais ce genre de canard vole dans l’opinion publique, et exclure expressément de telles demandes de soins dans un texte constituera un travail d’éclaircissement. »
D’autres amendements votés prévoient de restreindre la qualité d’ayant-droits des bénéficiaires aux seuls conjoints et enfants (et non plus aux ascendants et collatéraux), d’autoriser l’assurance-maladie à vérifier que le bénéficiaire de l’aide réside toujours en France et de permettre aux directeurs des caisses de récupérer les sommes indûment versées.
« Nous apportons des restrictions de bon aloi, a estimé Jean-François Copé, le patron des députés UMP. Un débat plus large aura lieu sur l’AME (...) peut-être dans la perspective du débat présidentiel » de 2012. Face aux inquiétudes de la gauche, Roselyne Bachelot a quant à elle assuré que « l’essentiel » du dispositif était « préservé ». Ce n’est pas l’avis des associations, qui continuent à penser que l’accès aux soins des étrangers sans papiers est ainsi fortement compromis. Pour le CoMéGAS (Comité des médecins généralistes pour l’accès aux soins), par exemple, le droit d’entrée « condamne de nombreux malades à rester sans soins ». Le comité s’associe aux associations (CISS, FNARS, ODSE, UNIOOPSS...) qui demandent que l’accès gratuite à l’AME soit conservé dans l’attente d’une généralisation de la CMU pour toutes les personnes à bas revenus, y compris les sans-papiers.
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